Immunodépression : définition, formes, causes et traitements
L’immunodépression est une pathologie particulière traduisant un affaiblissement du système immunitaire (système de défense de l’organisme) et constituant un facteur d’exposition à d’autres maladies. Il s’agit donc à la fois d’une maladie et un facteur de risque. On parle également de déficit immunitaire.
Qu’est-ce que l’immunodépression ?
Le système de défense de l’organisme est principalement constitué de cellules et de protéines ayant chacune une fonction déterminée, nécessaire et indispensable. Elles sont génétiquement programmées pour combattre les agresseurs extérieurs (appelés antigènes), qu’il s’agisse de bactéries, de virus, de parasites ou encore d’agents toxiques. Leur mission est donc de défendre l’organisme contre toute sorte d’agression pouvant le mettre en danger.
L’ensemble des composants du système immunitaire agit en synergie pour vaincre au plus vite l’antigène et se préparer à une prochaine attaque. Il développe ainsi, progressivement, de meilleures solutions pour défendre l’organisme en se basant sur les expériences antérieures. L’organisme garde tout en mémoire.
L’immunodépression est alors une déficience de l’immunité qui se traduit par l’insuffisance ou la défaillance de certaines fonctions du système de défense. Elle peut être d’origine génétique ou survenir suite à de nombreuses pathologies. On distingue alors le déficit immunitaire primitif (DIP) du déficit immunitaire secondaire (DIS).
Les formes d’immunodépression
Le déficit immunitaire peut être causé par une défaillance ou une absence de certaines cellules (DIP), ou par un facteur extérieur tel que les médicaments, la malnutrition ou l’obésité (DIS).
1. L’immunodépression primitive
Il existe une multitude de déficit immunitaire primitif (le Ministère de la Santé en dénombre près de 200) (1). En théorie, il y a autant de possibilités de déficience que d’acteurs intervenant dans le processus de défense immunitaire. Néanmoins, les DIP peuvent être regroupés en 5 grands groupes (2).
Les DIP humoraux sont les plus fréquents. Ils sont dus à une insuffisance d’immunoglobuline sérique, des anticorps indispensables au processus de défense immunitaire. Le risque d’infections diverses est alors accru. On parle également de déficit immunitaire commun variable (DICV) dans la mesure où cette forme de DIP est courante, mais due à des facteurs génétiques personnels et donc variables.
- Les DIP combinés sont beaucoup plus rares mais beaucoup plus dangereux. Ils traduisent un défaut des lymphocytes (cellules de l’immunité) et des anticorps, censés protéger l’organisme contre les bactéries. On parle souvent de déficit immunitaire combiné sévère (DICS) tant les risques de récidives et les symptômes sont importants.
- Le déficit de la phagocytose est caractérisé par un défaut du mécanisme (la phagocytose) permettant notamment à certaines cellules spécialisés de lutter contre un ensemble de particules étrangères.
- L’immunodépression du système du complément est une déficience d’une ou de plusieurs protéines du système du complément. Il s’agit d’un groupe de 35 protéines dont 12 sont directement impliquées dans les processus d’élimination des pathogènes. Les autres ont un rôle de régulateur visant à favoriser et contrôler l’activité des premières pour éviter des réactions auto-immunes (maladies provoquées par les propres composants de l’organisme).
- Les DIP complexes sont associées à des maladies génétiques ou des syndromes. Aujourd’hui, 15 maladies génétiques sont responsables de DIP complexes (3). Parmi les plus fréquentes, nous pouvons citer le syndrome de Wiskott-Aldrich qui associe eczéma, thrombopénie (diminution du nombre de plaquettes sanguines) et infections bactériennes (et/ou virales) récurrentes.
2. L’immunodépression secondaire
Comme les DIP, les déficits immunitaires secondaires sont nombreux. Ils sont dus à des facteurs environnementaux, comportementaux et médicaux entraînant un affaiblissement progressif de l’immunité.
- Le VIH (virus de l’immunodéficience humaine responsable du SIDA : syndrome d’immunodéficience acquise) est un facteur connu et reconnu d’immunodépression. Le virus entraîne la diminution du nombre de lymphocytes, cellules essentielles du système immunitaire. L’organisme est alors vulnérable à de nombreuses infections dites opportunistes car elles profitent de l’’affaiblissement des défenses pour se développer.
- La malnutrition (et plus spécifiquement la sous-nutrition) entraîne le dysfonctionnement de certaines cellules a cause d’un apport trop faible des composants nécessaires à leur bon fonctionnement. Elles ne parviennent plus à agir et remplir leur rôle de défenseur.
- Le diabète de type 2 engendre une nette diminution du nombre de cellules immunitaires. Le lien entre le diabète de type 2 et le déficit immunitaire a été mis en évidence dans une étude réalisée par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) (4).
- Les médicaments et les thérapies (notamment les chimiothérapies anticancéreuses) affaiblissent le système immunitaire en dégradant certaines cellules et en sollicitant l’organisme de manière trop importante.
- La leucémie est une maladie caractérisée par une surproduction de globules blancs anormaux qui perturbent le fonctionnement de l’immunité.
Déceler une immunodépression
L’affaiblissement du système immunitaire n’est pas facile à déceler. Il se constate généralement suite à l’apparition de maladies dont certaines sont graves et récurrentes. Elles peuvent se développer dès la naissance ou plus progressivement au cours de l’enfance ou de l’adolescence. La plupart du temps, les signes cliniques de la maladie semblent bénins et courants. Il peut s’agir d’otites, de diarrhées, d’infections pulmonaires ou encore de mycoses. Chez l’adulte ou chez l’enfant, certains signes peuvent néanmoins indiquer une immunodépression. Ils doivent être connus pour suspecter, diagnostiquer et donc traiter la maladie au plus vite. Ces signes cliniques ont été définit par le Centre de Référence Déficits Immunitaires Héréditaire (CEREDIH). En voici les principaux termes (5) :
- Des affections récurrentes à des voies respiratoires (4 à 10 fois par an) ou liés à un même agent pathogène récidivant.
- Des infections récurrentes et sévères (bactériennes, virales ou fongiques)
- Des pathologies inhabituelles dans leur fréquence, leur apparition, leur évolution, leur durée
- Un changement brutal dans la courbe de poids et de taille (courbe staturo-pondérale)
- Des antécédents familiaux
Que faire en cas d’immunodépression suspectée ou avérée ?
L’immunodépression est une maladie pouvant affecter tout le monde. Les hommes semblent néanmoins un peu plus touchés en raison de la transmission génétique du chromosome X. On parle de déficit immunitaire lié à l’X.
Les déficits immunitaires secondaires peuvent concerner l’ensemble des populations du globe, car ils sont dus à des facteurs non génétiques. Les déficits immunitaires primitifs, en revanche, sont influencés par des prédispositions génétiques affectant davantage certaines familles. Toute suspicion d’affaiblissement du système immunitaire doit faire l’objet d’une consultation médicale. Elle peut se faire auprès d’un médecin généraliste qui orientera le patient vers des confrères spécialisés.
Si un membre de la famille du patient est (ou a été) concerné par les DIP et que le gène responsable est connu, un diagnostic génétique sera proposé. Il permettra de vérifier si le ou les gènes pathologiques sont présents ou non. En revanche, si le gène n’est pas connu, il est nécessaire de faire une recherche génétique.
Le généticien évaluera ensuite avec le patient, les risques de transmission d’une maladie génétique. Il sera particulièrement attentif aux femmes désirant avoir un enfant. Une analyse moléculaire du sang de la future maman sera réalisée pour identifier si elle est porteuse du gène muté.
En cas de grossesse en cours, une analyse du sang du fœtus est envisageable. Elle permettra de savoir s’il est déjà porteur de la maladie et d’agir en conséquence. Mais cette technique ne peut être réalisée que si le gène en cause est connu. Il n’y a pas de recherche génétique sur un fœtus.
Les traitements différenciés de l’immunodépression
Les patients immunodéprimés ont généralement besoin d’antibiotiques pour combattre les infections bactériennes. D’autres médicaments peuvent être prescrits pour lutter contre les parasites ou les virus. Ils sont la plupart du temps administrés par voie orale.
Des traitements plus spécifiques à certaines formes d’immunodépression peuvent être prescrits aux patients. Ils dépendent des causes de la maladie et visent à traiter directement l’agresseur. Les possibilités de prescription sont donc nombreuses.
Dans les cas les plus risqués et les plus sévères, des interventions chirurgicales peuvent être envisagées. Elles consistent en la greffe de cellules souches au niveau de la moelle osseuse. Les cellules souches sont dites immatures, c’est-à-dire qu’elles peuvent se transformer en de nombreuses cellules du système immunitaire. Ces cellules sont prélevées dans la moelle osseuse d’un donneur compatible, puis injectées à un patient immunodéprimé. Mais l’intervention n’est pas sans risque. Le système immunitaire peut rejeter la greffe et causer de nouveaux dommages à l’organisme. Pour accroître les chances de réussite, la greffe doit être réalisée entre des membres de la même famille (les frères et les sœurs étant les donneurs idéaux).
La thérapie génique peut aussi être envisagée. C’est une pratique qui vise à corriger le gène défaillant en intervenant au sein même des cellules de l’immunodéprimé. Elle est toujours en phase d’essai clinique, et n’est donc pas systématique.